et si marie antoinette...

Là, pour une fois, je peux me montrer tout à fait assertive : NON ! D'abord, ce n'est pas un testament, mais une lettre que la condamnée a adressée à sa belle-soeur Elisabeth quelques heures avant d'être guillotinée. Elle lui a écrit pour lui laisser ses dernières pensées mais aussi, et surtout, pour lui confier ses deux enfants, Marie Thérèse Charlotte et Louis Charles. 

C'est une démarche d'autant plus essentielle que, sous les pressions de ses geôliers, Louis Charles a lancé contre sa mère et sa tante les pires accusations. La reine supplie donc sa belle-soeur de lui pardonner. 

Je sais combien cet enfant doit vous avoir fait de la peine. Pardonnez-lui, ma chère soeur, pensez à l’âge qu’il a et combien il est facile de faire dire à un enfant ce qu’on veut et même ce qu’il ne comprend pas. Un jour viendra, j’espère, où il ne sentira que mieux le prix de vos bontés et de votre tendresse pour tous deux.

Le premier argument porte donc sur le fond : quel faussaire trouverait des mots à la fois si simples et si justes pour exprimer un sentiment tellement personnel, tellement vrai ? Le tâcheron lambda ne serait-il pas allé chercher de grandes pensées philosophiques de circonstances ? 

Le second argument repose sur la forme. La dernière lettre de Marie Antoinette porte son écriture, très reconnaissable, mais également certaines de ses fautes typiques comme ce mot idée que, curieusement, la reine orthographie toujours avec un j :

De plus, comme toutes ses lettres à ses proches, celle-ci est signée d'un trait horizontal. 

Alors, pourquoi certains prétendent-ils que ce document si poignant est un faux ?

En fait, tout tient au parcours mouvementé qu'il connut. Après l'avoir terminée, Marie Antoinette confia sa lettre au concierge Bault, qui lui-même la remit à l'accusateur public. Au lieu de la délivrer, celui-ci la conserva. Fouquier Thinville fut à son tour traduit devant le tribunal révolutionnaire et ses papiers saisis. C'est ainsi que la dernière lettre de Marie Antoinette porte la signature de Fouquier et des commissaires chargés de l'inventaire. En 1816, elle fut retrouvée chez le conventionnel Courtois. 

Louis XVIII, sans doute pour en faire un momument à la gloire de la monarchie, en fit établir et distribuer des copies à l'orthographe corrigée. Copies qui poussent la minutie jusqu'à imiter l'écriture de Marie Antoinette...

Le faux est assez grossier et ne résiste pas à l'analyse, surtout pas avec sa version expurgée des fautes délicieuses de Marie Antoinette.

Toujours est-il que nous devons à cette malencontreuse initiative du nouveau roi les suspicions qui pesèrent tellement longtemps sur ce magnifique document.