et si marie antoinette...

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Madame de Polignac, fidèle amie ou arriviste ? (4)

 

 

Que reproche-t-on au juste à Madame de Polignac?

 

D'abord son entrée en scène. Les historiens rapportent en général que c'est un coup monté par sa belle-soeur Diane et son cousin-et-amant Vaudreuil pour faire tomber Marie Antoinette sous le charme. Il est vrai que nous avons là deux intrigants notoires, et que Yolande Martine Gabrielle veillera toujours à les satisfaire. On peut voir ce point sous deux angles: soit la petite comtesse, puis duchesse était une bonne pâte sous leur coupe, soit elle avait le sens de la famille, ce qui serait tout à son honneur.

 

S'il est indéniable que Madame de Polignac était d'un naturel indolent, elle ne manquait pas de caractère, puisqu'elle tint même tête à Marie Antoinette lors d'un grave différend avec Vaudreuil.  Je pense que, lui répondra-t-elle, parce que Votre Majesté veut bien venir dans mon salon, ce n'est pas une raison pour qu'elle prétende en exclure mes amis.  Le moins qu'on puisse dire, c'est que c'est envoyé! Pour moi, cette réplique démontre deux choses: que Madame de Polignac avait plus de poigne qu'on ne le croit souvent, et qu'elle tenait à ceux qu'elle aimait au point de se mettre en danger. 

 

D'ailleurs, son écriture ne présente aucune mollesse:

 

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Mais je m'aperçois que je n'ai pas encore mentionné à quel point Yolande Martine Gabrielle était belle. Petite, délicate, toute en courbes douces, noire de cheveux avec les yeux bleus et une séduction qui tenait toute à son naturel. Une simple fleur, un négligé la paraient et, dans cette Cour compassée et bouffie d'orgueil, sa candeur était comme un souffle frais. 

 

 

par Louis Elisabeth Vigée Lebrun, 1783

http://en.wikipedia.org/wiki/File:Gabrielle_de_Polastron.jpg

 

 

Sitôt la beauté infiltrée dans la place, dénoncent les biographes, la coterie invente une mise en scène. Madame de Polignac fait mine de vouloir se retirer avant d'être trop attachée à la reine. Nous ne nous aimons pas encore assez pour être malheureuses si nous nous séparons, dit-elle. Je sens que cela arrive déjà. Bientôt je ne pourrai plus vous quitter: prévenons ce temps-là. Laissez-moi partir de Fontainebleau. Je ne suis pas faite pour la Cour, tout le monde en sait trop ici pour moi. Bingo, selon les historiens: la reine donnera tout pour retenir celle qui veut s'en aller.

 

Et alors? Pourquoi cette scène serait-elle manigancée? Pourquoi Madame de Polignac ne serait-elle pas sincère? Elle n'aime pas la Cour, son mari non plus, elle ne s'y sent pas à sa place. L'amitié de la reine l'effraie, à cause de toutes les complications et les désagréments qu'elle implique. Pas besoin d'aller imaginer un complot de famille. L'explication donnée par l'intéressée elle-même tient parfaitement la route, pour moi.

 

Sans être pauvres, les Polignac ne sont pas en mesure d'assurer le train de la cour, a fortiori les frais de représentation qu'entraîne la faveur royale. Et Marie Antoinette le sait parfaitement. Elle fait donc en sorte d'obtenir pour le comte de Polignac une fonction suffisamment rémunératrice pour assumer le coût de son amitié. 

 

J'ai pris à moi, pour survivancier de M. de Tessé, Monsieur le comte de Polignac, colonel du régiment du roi et homme de très bonne maison, explique-t-elle à sa mère le 14 septembre 1776. Il est mari d'une femme que j'aime infiniment. J'ai voulu encore prévenir les demandes des Noailles, qui sont une tribu déjà trop puissante ici.

 

Petite parenthèse: non seulement Marie Antoinette assure l'avenir de gens qu'elle aime, mais elle joue aussi une carte politique. Elle barre l'accès à des familles qui prenaient trop d'importance à la cour et risquaient de devenir un danger pour la couronne... Prévention clairvoyante, hélas, nous le verrons dans l'Affaire du Collier... Le roi partage tout à fait cette préoccupation. Lui aussi va manifester une grande sympathie aux Polignac, principalement à Yolande Martine Gabrielle, qu'il apprécie beaucoup.

 

Bien sûr, la situation vue de l'extérieur a de quoi faire réagir: la comtesse devient duchesse puis gouvernante des enfants de France, sa fille est dotée largement, chaque membre du clan reçoit sa part du gâteau... Lors du procès de la reine, l'accusation lui demandera durement pourquoi les Polignac ont été par elle gorgés d'or.  Et Marie Antoinette répondra en toute simplicité qu'ils  occupaient à la cour des places qui leur procuraient des richesses.

 

 

 

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C'est en effet comme ça que fonctionne le système. Mais le bruit de la bonne fortune des Polignac se répand dans le peuple, où elle ne passe pas. Yolande Martine Gabrielle devient un des personnages fétiches de la littérature de caniveau. Au sein même de Versailles, la situation est tout aussi mal perçue. Les courtisans jalousent cette ascension fulgurante et clabaudent.

 

Mais il y a plus: le comte de Mercy, rapporteur de Marie Thérèse, se méfie, lui aussi. Il craint une influence qu'il sent déjà plus forte que la sienne et se met donc à colporter beaucoup de mal sur Madame de Polignac. Attaques et perfidies qu'il consigne avec méthode dans ses courriers envoyés à Vienne et légués ainsi à la postérité. Or, Mercy est une des sources incontournables pour les biographes de Marie Antoinette...

 

C'est donc tout un faisceau de témoignages orientés qui a noirci l'image de Madame de Polignac. 

 

Mais n'anticipons pas, nous sommes encore loin d'avoir examiné toute l'affaire!

 

 

 

 

 

 

 

 

 



03/01/2014
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